Utilisation d'un code de calcul d'aérodynamique bidimensionnelle instationnaire

 

Simulation du comportement instationnaire d'un profil de pale d'hélicoptère et
 jugement de l'influence de la compressibilité

 

 

 

 

Sommaire :

 

1.     Description succincte du fonctionnement de l’hélicoptère.

 

2.     Description du phénomène instationnaire du rotor

 

3.     Nécessité du calcul en instationnaire.

 

4.     Comparaison simulation numérique / essai en soufflerie.

 

5.     Conclusion: Utilité et limites de la simulation numérique.

 

 

 

 

Introduction :

 

La simulation numérique trouve sa place dans l‘élaboration d’un profil de pale du fait du caractère instationnaire de certains cas de vol. L’écoulement est toujours régi par les équations de Navier Stokes mais on ne sait plus les résoudre, il est donc nécessaire d’utiliser un modèle mathématique tenant compte de certaines hypothèses pour pouvoir décrire le comportement de l’écoulement autour de la pale. Cette simulation par le calcul n’est en aucun cas suffisante, elle vient en complément des résultats obtenus par les essais menés en soufflerie.

Notre étude nous a amené à utiliser un code de calcul

 


 

1.      Description succincte du fonctionnement de l’hélicoptère.

 

Description de l’hélicoptère

 

L’hélicoptère classique est composé de deux rotors :

-         le rotor principal, le plus gros, est celui qui soulève l’hélicoptère et le fait avancer et tourner.

-        

Le rotor secondaire, plus petit, est désaxé par rapport au rotor principal : son seul but est de créer un moment s’opposant à celui créé par la rotation du rotor principal, qui tend à faire tourner l’hélicoptère.

 

 

 

 

 

 

 


En vol stationnaire, la force de portance, créée par le rotor principal, est dirigée vers le haut, s’opposant directement au poids de l’appareil. Pour avancer, il suffit donc d’incliner vers l’avant cette force, donc de pencher l’hélicoptère en avant. De même, il peut reculer en penchant en arrière. Pour pencher dans un sens ou dans l’autre, il est nécessaire de créer un moment perpendiculaire à l’axe de rotation du rotor. Ce moment est obtenu en modifiant l’angle d’incidence des pales au cours de leur rotation.

De même, pour faire monter ou descendre l’appareil, on modifie la portance du rotor ; là encore, c’est l’angle d’incidence qui modifie la portance. Cette fois, on ajoute une valeur d’incidence indépendante de la rotation.

 

Le rotor principal est le plus complexe à étudier ; ses pales sont fixées sur le rotor par une liaison à trois degrés de liberté en rotation, pour éviter l’apparition de moments fléchissants trop élevés à cet endroit. En fonctionnement, les pales s’orientent de manière à former un cône. De plus, pour agir sur l’angle d’incidence, elles tournent sur elles même. On constate ainsi que cette liaison complexe permet en fait aux pales de se déplacer légèrement. Nous étudierons ici uniquement l’influence de l’angle d’incidence (réglable par un système de bielles, alors que les autres rotations ne sont pas contrôlées).


 

 

 

 

 

 


Bilan de puissance

 

Le moteur entraîne le rotor principal et le rotor arrière au travers de la boîte de transmission principale et de la boîte de transmission auxiliaire. La puissance transmise par la boîte de transmission principale est appelée puissance du rotor principal (Prp) et celle transmise par la boîte de transmission auxiliaire, puissance du rotor arrière (Pra). La puissance Pra consommée par le rotor arrière est fonction de la puissance consommée par le rotor principal : de l’ordre de 12 % de Prp en vol stationnaire et de 7% de Prp en vol d’avancement (c’est à dire à partir de 30 km/h). La puissance due aux pertes mécaniques (boites de transmission principalement) représente 5% de la puissance envoyée aux rotors principal et arrière. On constate donc que le rotor principal consomme le plus de puissance (83%) ce qui est logique puisque c’est lui qui porte et fait avancer l’hélicoptère.

 

Dans des conditions de vol normales, la vitesse de l’hélicoptère est de l’ordre de 250 km/h. Un ordre de grandeur de la vitesse de rotation de la pale : v=350 tr/min environ.

 


 

2. Description du phénomène instationnaire du rotor

 

Commençons par préciser ce que l’on entend par cas stationnaire et instationnaire.

Lorsque les paramètres tels que la vitesse varient dans le temps, on parle de conditions  instationnaires et de décrochage dynamique.

Pour une pale d’hélicoptère en vol d’avancement stabilisé, les paramètres d’incidence et de vitesse ne sont pas constants. Ils varient de manière périodique avec la rotation du rotor, nous nous trouvons donc dans le cas instationnaire.

 

(voir graphe du cercle inverse)

 

Deux phénomènes limitent la grande vitesse et apparaissent sur le rotor principal

-         Le décrochage en pale reculante

-         La compressibilité en pale avançante

 

Décrochage en pale reculante :

Dans le cas d’un rotor articulé au centre, il est nécessaire que le moment aérodynamique autour de l’axe d’avancement soit constant au cours de la rotation.

Le niveau de portance de la pale avançante devra donc être le même que celui de la pale reculante

 

L’écart de vitesse étant très grand entre ces 2 positions

-         En pale reculante les incidences seront très importantes et la vitesse relative de la pale faible (le cercle d’inversion limite cette vitesse)

-         En pale avançante, les incidences seront faibles et la vitesse relative de la pale élevée

 

Dans ce but :

-          On augmente la vitesse périphérique mais la divergence de traînée en pale avançante est préjudiciable.

-         On augmente la corde au détriment d’une désadaptation du rotor dans les autres cas de vol (traînée importante en vol stationnaire et à faible vitesse)

 

 

L’incidence de la pale est donc le seule paramètre que l’on peut faire évoluer pour ajuster la portance et  le moment aérodynamique.

 

Un phénomène important du fonctionnement aérodynamique d’un rotor est le décrochage : valeur limite de l’incidence des pales au-delà de laquelle la portance décroît rapidement.

Lorsque le décrochage apparaît, la traînée de profil est accrue et des vibrations importantes peuvent aller jusqu’à une perte partielle du contrôle du rotor.

 

Il se produit le même phénomène à partir d’un certain nombre de Mach, les polaires Cz locales nécessaires sur la pale reculante dépassent rapidement les limites des profils classiques. Il s’ensuit sur le rotor une augmentation catastrophique de la puissance.

L’angle d’incidence et le nombre de Mach sont ainsi les deux paramètres que nous allons devoir faire évoluer pour étudier le comportement de la pale.

 

En pratique, on impose à la pale reculante de ne pas dépasser une incidence de 13° en extrémité.

De la même façon, il est impossible de dépasser la vitesse du son puisque la pale reculante est toujours à une vitesse inférieure ; la pale avançante franchirait donc le mur du son à chaque tour, ce qui créerait une onde de choc et la dégraderait rapidement.

 

La modélisation du profil de la pale doit tenir compte des conditions instationnaires et doit prendre en compte ces paramètres.

Le cas stationnaire correspond aux équations de Navier Stokes, et il est possible de résoudre numériquement les équations différentielles. Le cas instationnaire répond également aux équations de Navier Stokes mais le problème est rendu plus complexe à cause du nombre de paramètres mis en jeu beaucoup plus important (une vingtaine). On ne peut pas résoudre ces équations, on utilise donc une méthode de calcul semi-empirique c’est-à-dire mettant en œuvre une représentation mathématique nécessitant la détermination de coefficients expérimentaux fonctions de l’angle d’incidence et du nombre de Mach.

Le code de calcul reprend ces coefficients et permet de les tester pour des conditions de vol données (vitesse et angle d’incidence notamment).

 

 

 

 

3. Nécessité du calcul en instationnaire

 

Les conditions de calcul imposées par le caractère instationnaire amènent à conduire simultanément :

-         La validation des méthodes numériques

-         Les modélisations et les adaptations de ces méthodes pour pouvoir déterminer et analyser les écoulements instationnaires rencontrer dans la réalité

-         Les comparaisons avec des résultats de mesure et de visualisation expérimentaux afin de compléter et orienter les futures expérimentations.

C’est une mise au point permanente par expérience.

 

Au cours de notre étude, nous nous sommes plus particulièrement intéressé à l’utilisation d’un code de calcul fonctionnant sur la base d’un modèle mathématique semi empirique programmé en Fortran, langage utilisé notamment par Eurocopter.

 

Ce programme repose sur une hypothèse principale :

 

Une petite variation de l’incidence a dans le domaine non linéaire implique une petite variation de Cz et l’on va considérer cette petite variation comme linéaire. On décompose ainsi le domaine non linéaire en une succession de petits domaines linéaires.

                                                              dCz = k.da

 

Le code utilise le modèle mathématique suivant pour lequel nous ne ferons pas la démonstration tout simplement parce qu’il fait appel à des outils mathématiques que nous maîtrisons mal.


 

 

 

 


 

Cz1 domaine linéaire

Cz2 domaine non linéaire

DCz hypothèse à partir de la polaire stationnaire

 

Le plus important est de comprendre que le code agit sur les coefficients sans dimension l et k

 

l : amplitude réduite de variation de vitesse

k : fréquence réduite


 


 

 


Où A est l’amplitude donné à la pale en translation en soufflerie et c la longueur de la corde

 


 

 


Mesurer et caractériser le comportement aérodynamique global et local du profil étudié

V=V¥*(1+lcos(wt))

a=a0+Da*cos(wt)                Da amplitude du tangage

 

 

Sur les hélicoptères actuels l=0.4 et Czm<0.7

Il faut diminuer Czm sur le rotor

 

 

 

Courbes tracées à l’aide du code de calcul :

 

·        (a) Dans un premier temps nous avons voulu comparer  le Cz obtenu en régime stationnaire au Cz obtenu en régime instationnaire par le code de calcul pour des valeurs du nombre de Mach allant de 0.3 à 0.7 sur le profil OA207 qui équipe les hélicoptères Puma et les super Puma en bout de pale.

On remarque qu’à Mach 0.3, on retrouve la même pente en stationnaire et en instationnaire pour la montée du Cz en fonction de l’angle d’incidence.

La première chose que l’on observe sur ces courbes, c’est l’apparition d’un phénomène d’hystérésis sur les courbes instationnaires. La portance de la pale diminue dangereusement après avoir atteint le Cz max, c’est le décrochage.

Ensuite en augmentant le nombre de Mach, on voit que le Cz maxi reste le même mais que le Cz mini diminue de 0.60 pour Mach 0.3 jusqu’à 0 pour Mach 0.7, l’incidence variant toujours entre 6 et 18°.

 

 

·        (b) Nous avons ensuite comparé la portance pour deux couples de valeurs de l et k.

Si l’on considère que la vitesse Vmoy et w sont des paramètres liés aux conditions de vol, on s’attachera uniquement à déterminer la corde et le paramètre A, amplitude de translation de la pale ; ces deux paramètres sont proportionnels à l et k.

Ainsi on remarque que l’amplitude de variation de Cz est plus faible pour le couple l=0,25 et k=0,05 mais il apparaît aussi une petite boucle à aire négative, quelque soit la vitesse considérée (de Mach 0,3 à Mach 0,7). Cette aire négative est le signe d’une instabilité ; toutefois, ici, l’aire est petite, ce qui signifie que l’instabilité est de très courte durée et n’a pas le temps de se développer.

Si l’on calcule l’aire totale de la courbe il faut s’assurer que celle ci est positive, car elle reflète la portance d’une pale durant un tour de rotor.

 

·        (c) Une comparaison des Cm pour plusieurs nombres de Mach nous montre que le décrochage est d’autant plus important que le nombre de Mach est élevé. Ceci souligne la limitation en vitesse inhérente à l’hélicoptère.

 

·        (d) Nous avons dans un quatrième temps comparé le moment Cm pour deux couples de valeurs de l et k :

Le moment Cm est le moment créé par la portance, calculé à 25% de la longueur de la corde. On constate que pour le couple l=0,25 et k=0,05 la courbe est majoritairement négative, alors que pour le couple l=0,30 et k=0,08 on atteint une valeur maximale de 0,15. La seule contrainte de Cm est d’avoir une aire positive, ce qui est ici le cas pour les deux couples de valeurs, puisqu’il n’y a aucune boucle. Soulignons aussi que ces courbes ont été effectuées avec la polaire du profil SA131 alors que toutes les autres utilisent celle du profil OA207. Ceci ne change en aucun cas la théorie de l’étude, mais seulement les valeurs obtenues.

 

·        (e) Un autre relevé compare les valeurs de Cm obtenues pour différentes vitesses d’avancement : on constate alors l’apparition de grandes boucles à aire négative, (pour un sens de parcours de la courbe qui est le sens horaire) au point que l’intégrale complète peut devenir négative (si la –les- boucle est plus grande que la boucle principale). physiquement, cela signifie que c’est l’air environnant qui fournit de l’énergie à la pale ; ceci est absurde dans la réalité puisque l’air est au repos, sauf si l’on considère que l’énergie est communiquée à l’air par la pale précédente !
Dans ce cas, bien que le programme ne le signale pas, on est hors domaine de simulation, car la pale est détruite sous l’effet des vibrations. Ce cas est volontairement exagéré pour que les courbes soient représentatives : en effet, les angles d’incidence choisis sont de 12°
±10° alors que dans la réalité, on se limite à une plage de 2° à 12°.

·        Ce type de relevé (Cm pour plusieurs valeurs de vitesse) a été calculé pour deux valeurs de l (0,6 et 0,25) et deux valeurs de k (0,12 et 0,05). Une première constatation, lors de l’exécution du programme, était que pour les grandes vitesses (Mach 0,7 ou 0,8), le code était incapable de donner un résultat pour Cm : ceci est du au fait que les données entrées (à savoir la polaire) sont limitées et pour certains coefficients on  dépasse ces limites à grande vitesse ; ainsi le programme, ne trouvant pas de correspondance sur la polaire, renvoie un message d’erreur.
Une deuxième constatation est que l’aire totale devient manifestement négative. Pour nous en assurer, nous avons calculé l’aire de quelques courbes à l’aide d’un Macintosh (Excel se montrant incapable d’un tel calcul), pour le couple
l=0,6 et k=0,05 à Mach 0,3 l’aire est positive, elle vaut 0,56. Alors que pour le même couple et à Mach 0,6, l’aire est négative (-0,02). Ces valeurs de l et k sont donc à proscrire, il convient donc de calculer la corde et les paramètres de vitesse en conséquence. Ainsi, on déterminera les valeurs de l et k optimales selon les conditions de vol que l’on s’est imposé.

 

 

4. Comparaison simulation numérique / essai en soufflerie.

 

Dans un premier temps, les essais en soufflerie viennent pour étalonner les coefficients des calculs numériques. Ces coefficients jouent un rôle majeur dans l’efficacité de prédiction du modèle. On procède à les expériences sur des modèles qui nous intéressent et on cherche à retrouver ces résultats numériquement.

Le code de calcul permet dans un premier temps de déterminer le couple de coefficients optimisés l et k et, dans un deuxième temps, de mieux cibler les essais à réaliser en soufflerie.

 

 

Dans la pratique, il existe des programmes sources desquels on extrait la partie qui nous intéresse en fonction de ce qu’on veut savoir, la portance , la traînée, le moment… Ces programmes sont appelés code, ils utilisent des polaires stationnaires qui ont été obtenues expérimentalement par des essais en soufflerie. Parfois, comme pour le code que nous avons utilisé, il suffit de donner les conditions d’utilisation (vitesse d’avance, c’est à dire vitesse à l’infini amont, ainsi que vitesse de rotation du rotor) mais pour des codes plus compliqués, on utilise un mailleur, un programme qui permet de recréer l’objet à modéliser (DAO) et de lui appliquer des conditions limites, portant sur la vitesse d’écoulement ou la pression par exemple.

Le programme utilisé lors de cette simulation est de 650 lignes environs, mais il est issu d’un algorithme plus complexe de plus de 9000 lignes. Le langage utilisé est le Fortran, qui est un très vieux langage qui a peu évolué. En particulier il y a eu des incompatibilités de transfert entre les PC et les Macintosh. Il est remarquable que, malgré les différents langages apparut depuis, (Turbo pascal, C++…), le Fortran est toujours le plus utilisé en entreprise et dans la recherche.


Conclusion :

 

Le code de calcul est donc tout d’abord déterminé par les essais en soufflerie, de manière empirique. Passé cette première étape, la simulation permet de faire beaucoup plus d’essai à moindre coût et moins de temps. De plus, elle permet aussi de simuler des hélicoptères grandeur nature, alors qu’on ne peut étudier en soufflerie que des modèles réduits pour des raisons techniques évidentes.